samedi 6 octobre 2012

Train-train de nuit

Nous sommes obligés de quitter la Marche pour suivre les consignes de sécurité d'Ekta Parishad concernant les internationaux ; nous la retrouverons dans quelques jours. A peine arrivée à l'hôtel, je me retrouve en direct de l'émission "Allô la planète" d’Éric Lange pour raconter cette expérience. J'essaye de faire passer le message des marcheurs au maximum, même s'il m'interroge sur ma capacité d'adaptation à l'Inde dans ces conditions : comment lui dire à quel point les petits soucis gastriques des voyageurs que nous sommes sont ridicules à côté des problèmes de ces paysans qui ne mangent pas à leur faim tous les jours...
Bref, nous rejoignons ensuite l'équipe d'Alter éco, entreprise française de commerce équitable.
Ils sont venus à 20 pour assister entre autres à la Marche : des salariés, venus à leurs frais et sur leurs congés pour retrouver les valeurs d'origine de l'entreprise au contact de la réalité de leurs producteurs indiens, dont certains représentants du Darjeeling sont présents. Alter éco a par ailleurs eu la bonne idée de proposer à des producteurs français de l'agriculture biologique en Charentes-Maritimes de se joindre à leur délégation. La discussion entre nous tous porte donc rapidement sur les problématiques agricoles, notamment sur les similitudes des situations des paysans* en France et en Inde, toutes proportions gardées : difficulté d'accès à la terre, pression du marché, résistance contre la monoculture intensive... Trop de choses à se dire... qui intéressent notamment Anne, de notre groupe, qui travaille entre la Confédération paysanne et Semences paysannes, et Joseph qui compte bien cultiver son lopin de terre un jour. Mais nous quittons cette discussion un peu vite pour manger avant de prendre le train de nuit pour 14h de trajet au Sud vers Sewagram, dans la région du Maharashtra.
Sur le quai de la gare, des gens dorment à même le sol ; difficile de savoir s'ils vivent là où s'ils attendent leur train. Notre voiture est composée de compartiments où les banquettes se transforment en couchettes assez moelleuses. On a des places numérotées, donc c'est presque le grand luxe. Il faut un peu négocier avec nos voisins mais tout le monde trouve sa place au bout d'un moment, sur 3 étages, et on éteint les feux, bercés par le roulement de la bête. 
Lucile au petit matin
Vers 6h du matin, le business des marchands du train reprend, et ce sera tout le long du trajet un festival de propositions commerciales en tous genres, avec aussi des vendeurs qui montent dans les voitures à chaque station : bananes, tchaï et café, cacahuètes, jouets en plastique, journaux, eau, un vendeur de pop corn avec un sac immense... des mendiants aussi, hommes estropiés ou femmes avec bébé. Et puis tout à coup deux petits gamins plus ou moins déguisés qui surgissent devant nous en faisant des acrobaties dans l'allée centrale pour demander la pièce. On sympathise avec notre voisin de banquette et aussi avec une dame qui ne parle pas un mot d'anglais. Philippe a, pour ce genre de rencontres, un petit album de photos de France qui permet d'échanger avec les gens, même sans trop pouvoir parler, et d'ébranler certains de leurs clichés à eux aussi (comme sur les SDF en France). 13h30 : ça ne fait pas de mal d'arriver enfin. Tout de suite la chaleur tropicale de Wardha nous tombe dessus.
Nous arrivons à l'Institut d'études gandhiennes. C'est une sorte de campus fait de maisonnettes éparses au milieu d'une végétation luxuriante, d'oiseaux, d'écureuils, de crapauds et de bêtes en tous genres. On nous emmène aussitôt sous une tente pour le déjeuner. Nous sommes servis comme des rois par les étudiants du campus, sur un plateau en aluminium : petit soupe de légumes, dal (légumineuses en sauce), chapati (galettes), lait fermenté avec des céréales, sauce aux légumes pimentée, riz, petit dessert sucré. C'est délicieux et on sent déjà ici l'atmosphère calme et inspirée des ashrams.

L'Institut accueille 8 étudiants cette année, qui viennent après leur Licence en divers domaines se former pendant une année à la pensée gandhienne appliquée au travail social. Parmi eux, deux Sud-Soudanais, un Népalais et évidemment des Indiens. Les études se font en anglais. Comme dans tout ashram, la vie communautaire propose un rythme quotidien assez marqué, depuis tôt le matin jusqu'au dîner : prières, yoga, repas en commun, cours, lecture, thé. 
Pour lors, nous avons bien besoin de quelques heures de repos... 

4 commentaires:

  1. Super, Magali pour tous ces échos d'Inde. Peux-tu nous dire où en est la marche (répercussions médias locaux, etc...) ? Est-ce que de nouvelles personnes rejoignent la "longue marche ?"...
    MERCI !

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  2. J'ai été ravie de faire mon initiation sur le parcours Le Mans-Connerré en pensant à toi et avec des personnes qui te connaissent grâce à blog partagé chaque jour avec les marcheurs qui seront à Paris le 17 octobre !
    Grosses bises
    "Tata"Françoise

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  3. Je suis ton périple avec beaucoup d'intérêt et d'émotion. J'aimerais participer à cette marche...Bravo Magali et merci de nous faire marcher avec toi par la pensée.
    Claudine

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  4. Merci pour ce partage d'émotions, de couleurs, de senteurs et de mémoires de toutes cette population de tout ce peuple indien si INCROYABLE qu'il faut le voir pour le croire.
    J'aimerais y être, participer à cette transhumaine mais ne le pouvant physiquement, je me permets de vous accompagner par la pensée et le coeur.
    Le bonjour à Anne

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